Le Manteau de Rectitude et les Couleurs des Sephiroth

Un article de Jacobus Swart : Le Manteau de Rectitude et les Couleurs des Sephiroth. 

Etant actuellement dans la compilation de sources afin de faciliter de plus amples investigations au sujet de l’âme dans une perspective kabbalistique, je suis tombé accidentellement, dans ma bibliothèque, sur quelques éléments de la littérature de la Merkabah dédiés au Malbush (« vêtement »). Une bonne part de cette littérature a survécu à l’oeuvre du temps. Certaines parties sont disponibles en anglais dans les compilations et les écrits de Martin Cohen portant sur le Shi’ur Komah. Le Malbush se réfère au « vêtement » qui anime des entités devant s’en vêtir elles-mêmes, agissant presque comme une peau, et qu’elles doivent porter lorsqu’elles descendent dans les « mondes inférieurs » comme le nôtre. Selon ces textes, des êtres élevés, c’est-à-dire des anges, doivent agir de cette manière afin d’être visibles aux hommes. Je suis également tombé sur un chapitre comparant ce revêtement du Malbush à la saga de la « Chute de l’Homme ». L’auteur dit que nous étions aussi originellement des êtres spirituels, mais que nous dûmes nous vêtir des « tuniques de peau » afin d’exister dans ce monde ici-bas.

Voici une citation d’un texte kabbalistique anonyme, le Sefer ha-Meshiv (Livre de la Réponse), apparemment écrit en Espagne dans la première moitié du 15e siècle. En voici les parties pertinentes :

« Vous devez savoir que le secret qui cause la descente du livre supernel est le secret de la descente du Chariot supernel, et lorsque vous prononcez le secret du grand Nom, immédiatement la force du « vêtement » descendra, ce qui est le secret d’Élie, qui est mentionné dans l’oeuvre de nos sages. Et par cela Rabbi Siméon bar Yochaï et Jonathan ben Uzziel acquirent leur sagesse, et ils méritèrent le secret du « vêtement », afin d’en être revêtus. Et Rabbi Chanina et Rabbi Nechuniya ben ha-Kanah et Rabbi Akiva et Rabbi Ishmaël ben Elisha et notre saint rabbi et Rashi et beaucoup d’autres l’apprirent de la même manière. Et le secret du « vêtement » est la vision du vêtement, dont l’ange de Dieu est revêtu, avec un oeil matériel, et c’est lui qui vous parle… Et le secret du vêtement fut donné à ceux qui craignent Dieu et qui méditent sur Son Nom ; ils l’ont vu, ces hommes qui sont des hommes de Dieu furent dignes de cet état. Et ils firent continuellement la fête durant quarante jours, et durant la fête ils prononcèrent le Tétragrammaton quarante-cinq fois, et au quarantième jour le « vêtement » descendit vers eux et leur montra tout ce qu’ils désiraient savoir, et il demeura avec lui jusqu’à l’accomplissement de l’étude du sujet qu’il désirait savoir… »

Comme c’est le cas avec les êtres angéliques qui doivent porter le vêtement dans leur descente dans ce monde ici-bas, nous devons également nous revêtir d’un vêtement de lumière afin de nous élever vers les royaumes supérieurs. Ainsi, il existe des techniques mystiques appelées « Vêture du Nom » dans lesquelles le Tétragrammaton est visualisé comme s’il était écrit sur les différentes parties du corps du mystique, qui, au même moment, exprimerait les quatre lettres du Nom Ineffable combiné avec les voyelles spécifiques qui correspondent respectivement aux parties corporelles sur lesquelles on se focalise. Parfois cette « vêture du Nom » fut prise assez littéralement, comme dans le cas de l’oeuvre intitulée Le Livre de la Vêture et de l’Arrangement du Manteau de Rectitude. Ici, un simple morceau de parchemin fut choisi et un vêtement sans manche, sous la forme de l’Ephod du Grand Prêtre, en fut découpé. Il couvrait les épaules et la poitrine, tombant sur les côtés sur les hanches et revenant sur le nombril. Une capuche fut assemblée au vêtement, et sur cette « robe magique », les Noms Divins Secrets furent écrits. Le pratiquant ne pouvait cependant revêtir cette robe avant que les conditions qui suivent aient été remplies. Le porteur du vêtement devait faire une fête durant une semaine, ne pouvait toucher quoi que ce soit de non pur, et devait suivre un régime végétarien. À la fin de la semaine, il était supposé se rendre à un point d’eau, tel qu’une rivière ou un lac, durant la nuit et faire appel au Nom Divin écrit sur la robe. S’il voyait une forme verte au-dessus de l’eau, alors quelque chose d’impur subsistait en lui, et les préparations devaient alors être répétées pendant sept jours, accompagnées de Mitzvoth (bonnes actions) et de Tsedakah (charité). Si la forme au-dessus des eaux était rouge, « sachez que vous êtes pur intérieurement et apte à porter le Nom. Allez alors dans l’eau jusqu’au nombril et revêtez-vous du vénérable et terrible Nom ». Cette « vêture du Manteau de Rectitude » était censée donner à son porteur un pouvoir incommensurable.

C’est un mystère pour moi de savoir pourquoi la vision d’une forme verte « au-dessus de l’eau » signifie une « impureté » ou pourquoi la vision d’une forme rouge devrait spécifiquement être équivalente à la « pureté », mais il y a peut-être quelque clé au sein des premiers systèmes de la Kabbale qui attribuent des couleurs aux Sephiroth de l’Arbre de Vie, les couleurs étant alors principalement le bleu, le rouge, le vert, le blanc et le noir. Bien sûr, les deux dernières ne sont pas à proprement parler des couleurs, mais nous devons nous souvenir que ces dernières étaient définitivement considérées comme telles par ces auteurs. Le rouge, le vert et le blanc sont de loin les couleurs les plus importantes dans ce système que Cordovéro explique en détail dans son introduction à la Kabbale intitulée Ne’erav (La Lumière Plaisante). Il dit : « les couleurs sont attribuées aux qualités (Sephiroth) selon leurs actions », et originellement elles étaient :

Kether – Blanc/Noir

Hokhmah – Bleu

Binah – Vert

Hessed – Blanc

Guebourah – Rouge

Tiphereth – Blanc

Netzach – Rouge

Hod – Vert

Yesod – Blanc

Malkhut – Blanc

Rabbi Cordovéro explique que l’on ne peut attribuer une couleur à Aïn, qu’aucune couleur ne peut être attribuée à Kether, une Sephirah comprise comme l’équilibre entre les états de l’être et du devenir, mais occultée, au sein de Aïn. Il se référait à Kether comme représentée par les extrêmes du blanc et du noir. Blanche, elle est comprise comme la « miséricorde », elle montre la « Miséricorde de Kether ». L’attribution du noir est censée indiquer la véritable essence de la Divinité, au-delà du temps, de l’espace et des événements. Ainsi, le grand Rabbi a écrit dans le Pardès Rimonim (Jardin de la Grenade) : « Cette essence ne change pas du tout de couleur, ni jugement ni compassion, ni droite ni gauche. Cependant, émanés au travers des Sephiroth le jugement et la compassion prévalent ».

Cordovéro décrivit Hokhmah comme « le commencement de l’action » et se référa au bleu comme « commencement du développement de la couleur à partir du noir » ou la première des radiations de la lumière à partir de Aïn Sof. Il dit plus loin que le vert est attribué à Binah puisque cette couleur « contient les couleurs du rouge et du blanc, qui sont perçues ensemble ». Il dit également que le vert « contient la couleur bleue, qui vient de Hokhmah ». Cordovéro dit simplement que Binah unit les principes de la « Miséricorde » et de la « Sévérité », respectivement « blanche » et « rouge » et canalisant également la « Sagesse » (bleue).

Maintenant, tandis que le « blanc » est attribué à Hessed, sa couleur est considérée comme étant quelque peu différente de celle de Kether, presque comme si la Lumière de la Miséricorde, ayant été reçue vie Hokhmah et Binah, était contaminée et donc grisée, avec une bonne dose de bleu (sagesse) en elle. Tandis que Guebourah est considérée comme étant rouge (la couleur du jugement), Cordovéro lui attribua un nombre de couleurs. Il dit que le bleu peut aussi être. Il dit que le bleu peut y être décelé puisque la Lumière de Guebourah est également émanée de Hokhmah et de Binah, mais il dit que cette Sephirah est également noire car elle contient l’aspect de la rétribution que « noircit les faces des créatures ». Cordovéro considérait le lien spécial entre Guebourah et Binah en se référant au « vin joyeux qui coule de Guebourah à Binah ».

Tandis que Tiphereth est traditionnellement comprise comme blanche, Cordovéro vit qu’elle est fondamentalement verte, et qu’elle comprend les principes représentés par plusieurs couleurs oeuvrant avec cette Sephirah spécifique. Il écrit ainsi : « Ils lui attribuèrent le saphir en extension de Da’at. Dans son aspect révélé de la détermination, elle inclut le blanc et le rouge, c’est-à-dire, le vert d’une coquille d’oeuf, en vérité. Tiphereth inclut les couleurs de Hessed et de Guebourah d’une des deux manières. Elle est à la fois au-dessus d’elles dans le mystère de Da’at, qui les inclus dans la racine ou dans son aspect inférieur, c’est-à-dire, le mélange du rouge et du blanc. Elles sont le mystère des anges Uriel, Raphaël, Gabriel, Michaël et Nouriel ».

Netzach et Hod sont respectivement décrites comme « un rouge virant au blanc, car c’est principalement la miséricorde du fait de son orientation au côté de Hessed » et « blanc virant au rouge car c’est principalement le jugement du fait de son orientation du côté de Guebourah ».

À nouveau, là où Yesod était originellement considéré comme blanche, comme l’étaient toutes les sphères du Pilier du Milieu – qui est le Pilier de l’Etreté par contraste avec les Piliers extérieurs de l’Action – Cordovéro maintenait que Yesod était un mélange de blanc-rouge et de rouge-blanc, se concentrant ainsi sur les qualités de Netzach et de Hod en son sein. Cependant, puisque la Lumière de Yesod est réfractée via les Sephiroth précédentes, la couleur de Yesod était également comprise comme étant un saphir bleu.

Enfin, Malkhut, qui est blanche originellement était vue par Cordovéro comme comprenant toutes les couleurs, c’est-à-dire, toutes les Lumières dévivées des Sephiroth et qui se concentrent en Malkuth qui est tel un arc-en-ciel.

À présent, en regardant cet enseignement selon lequel les Sephiroth du Pilier du Milieu sont blanches, et que les couleurs rouge et verte sont connectées à certaines Sephiroth des Piliers Extérieurs, il est clair que la « Compréhension » et la « Splendeur » représentant le sommet et le bas du Pilier du Milieu sont vertes, tandis que « Sévérité » – qui représente les force de Din (Jugement) et de Netzach (Victoire) sont rouges.

Le Manteau de Rectitude et les Couleurs des Sephiroth
Image extraite du site L’antre du loup qui dort.

En utilisant cette information afin de comprendre les références faites aux états de pureté et d’impureté dans une tentative de se revêtir du « Manteau de Rectitude », et qui sont indiquées comme des formes verte et rouge au-dessus des eaux, et sachant très bien que l’on est souvent confronté avec ce dont on a le plus besoin dans sa vie, ces messages peuvent être interprétés de cette manière :

La forme verte : « Alors que vous percevez la Splendeur (Hod-vert) de la compréhension (Binah-vert), vous êtes dans un état de déséquilibre (Pilier Gauche uniquement). Vous n’avez pas fait preuve d’auto-discipline (Guebourah-rouge) afin de vaincre (Netzach-rouge) les désirs inférieurs (Netzach-rouge) et vos peurs (Guebourah-rouge) ».

La forme rouge : « Vos peurs (Guebourah-rouge) ont été vaincues (Netzach-rouge). Ayant procédé avec détermination (Netzach-rouge), vous avez été amené par votre discipline (Guebourah-rouge) à un état de victoire (Netzach-rouge) qui perdurera (Netzach-rouge) ».

Cependant, il existe de nombreuses manières de lire ces indications… autant qu’il y a d’êtres pour les interpréter. Tout le monde les lira en accord avec ses propres perceptions. En vérité, chacun de nous perçoit le monde au travers de prismes « moi-colorés ».

Finis.

Le Manteau de Rectitude et les Couleurs des Sephiroth, Jacobus Swart.

Traduction française par Spartakus FreeMann, Nadir de Libertalia, novembre 2005 e.v.

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