Le Christ, le Saint Chrême et le Cannabis par Chris Bennett
Comme nous le savons [l’auteur fait ici référence à un autre article : La Plante de la Gentillesse : « Cannabis et Chrétienté »] le principal ingrédient de l’huile de consécration était le cannabis. Il y avait une quantité suffisante de cannabis pour faire de cette huile un puissant agent psychoactif. Aussi bien utilisée par Moïse, Aaron et les prêtres de la tribu des Lévites, dont le statut était conféré par l’utilisation de l’huile de consécration, la consécration devint également un moyen de couronner les nouveaux rois d’Israël et de Judée. Tous ceux qui ont expérimenté l’huile de consécration étaient connus pour être consacrés ou en hébreu être le « messie ».
Ce terme peut être familier à nombre d’entre nous. Mais cet en ce titre que réside une surprise. Car le terme hébreu de « meshiah » signifie « le consacré » ; alors qu’en grec le mot utilisé est « Christ ». Christ, comme « meshiah », signifie consacré. Afin d’être le Christ, on devait donc être consacré. Si Jésus n’avait été consacré, il ne serait pas devenu le Christ.
Comme nous l’avons vu, l’huile de consécration provient d’une pratique qui a suivi le retour de l’exil de Babylone, et son utilisation a connu alors un déclin qui a continué jusqu’à la révolte des Maccabées et de l’occupation romaine où l’on ne retrouve que de rares traces de références à l’huile. Mais, il y a d’amples évidences que Jésus a réintroduit l’utilisation de l’huile de consécration psychoactive et qu’il était d’un usage courant parmi les premiers chrétiens. Tout comme le Christ, ou Consacré, ceci peut être une clé du mystère central de sa vie.
Les écrits polémiques des premiers pères chrétiens nous donnent une vision de la vie, des croyances et des pratiques des gnostiques hérétiques. Pour ces dogmatiques des premiers temps du christianisme, les gnostiques suivaient une vision erronée de Jésus et devaient donc être corrigés ou éliminés. Mais c’est au travers de leurs écrits que nous pouvons voir que l’huile de consécration était en réalité tenue dans un respect particulier par les gnostiques et qu’il y avait un pouvoir spécial contenu en elle qu’ils considéraient comme primordial.
« Celse rapporte que les gnostiques ophites possédaient un sceau dont le récipiendaire se voyait fait Fils du Père ; sa réponse était alors : J’ai été consacré par l’huile de l’Arbre de la Vie… Dans certains textes gnostiques comme la Pistis Sophia et le Livre de Jeu, la « consécration spirituelle » était requise pour l’entrée d’un individu au sein du Plérôme » (Rudolph, 1987). Du point de vue gnostique, comme on peut le lire dans l’Évangile de Philippe, les pseudo-initiés du rite vide du baptême « descendent dans l’eau et remontent sans avoir reçu quoi que ce soit ». Ici, nous pouvons voir que le baptême qui deviendra central dans la notion de salut dans le christianisme catholique n’était pas considéré avec la même révérence que l’huile de consécration, ou « chrême », par les gnostiques. Pour les gnostiques c’est l’huile de consécration qui détient les clés de la grâce.
« Il y a une eau dans l’eau, et un feu dans le chrême », Évangile de Philippe. « La consécration avec l’huile était l’introduction du candidat dans une félicité sans fin et il devenait alors un Christ » (Mead, 1900).
En effet, le traité gnostique de l’Évangile de Philippe nous dit que « le chrême de consécration est supérieur au baptême. Car par la consécration nous sommes appelés « consacrés » (chrétiens), et non par le baptême. Et le Christ aussi était ainsi appelé à cause de la consécration, car le Père a consacré le Fils, et le Fils a consacré les apôtres, et les apôtres nous ont consacrés. Celui qui a été consacré est le Tout. Il a la résurrection, la lumière, la croix, le Saint-Esprit… » Au travers du texte la « lumière » est « habituellement associée avec le chrême » (Isenberg, 1978), et il est dit que « celui qui reçoit cette onction… cette personne n’est plus un chrétien, mais le Christ » (Évangile de Philippe). De la même manière, l’Évangile de Vérité nous dit que Jésus vint spécifiquement en leur sein afin qu’il « puisse les oindre avec la consécration. Cette consécration est la miséricorde du Père… ceux qu’il a consacrés sont ceux qui sont devenus parfaits ».
De la même manière, les premiers chrétiens étaient chrétiens du fait, et de ce fait seul, qu’ils avaient été oints par la sainte huile de consécration.
Le Christ, le Saint Chrême et le Cannabis par Chris Bennett et Neil MacQueen, traduction française par Spartakus FreeMann, Nadir de Libertalia, juillet 2004 e.v.
Illustration : Onction de David par Samuel, enluminure de la BNF.