Caïn et Abel par Guizel.
Lorsque l’on relit le passage de la Genèse (Gen 4. de 1 à 7) et la traduction donnée, on ne peut qu’être étonné de ce qui se passe dans le choix et la préférence de D. pour le cadeau d’Abel ; mais à s’y pencher de plus près, et en travaillant sur les combinaisons de certaines lettres et la polysémie de certains mots formés, on peut peut-être supposer la raison de ce choix :
« Le Seigneur se montra favorable à Abel et à son offrande, mais à Caïn et à son offrande Il ne fut pas favorable ».
Reprenons le passage :
« Abel devint pasteur de menu bétail. Caïn cultiva la terre. »
Plus loin: « Caïn présenta du produit de sa terre une offrande au Seigneur » :
ק י ן מ פ ר י ה א ד מ ה מ נ ח ה ל י ה ו ה
מ פ ר י le fruit
ה א ד מ ה de la terre cultivée, du champ
מ נ ח ה sens1 : don, présent / 2. sacrifice, tribut
Quant au reste du texte hébreu :(4)
ו ה ב ל ה ב י א ג ם – ה ו א מ ב כ ר ו ת
צ א נ ו ו מ ח ל ב ה ן ו י ש ע י ה ו ה א ל – ה ב ל ו א ל –
מ נ ח ת ו
Nous retrouvons la notion de « don » ( מ נ ח – mais avec le suffixe ת ו qui implique l’action de déposer ( sur une table ou aux pieds de) comme un trésor.
Mais on trouve également ת ו avec le sens du signe, de la marque, de la requête.
Il ya aussi ( ה ב י א ( ב
le don de celui qui aime ou aimer donner
ה ו א celui-ci
א ג ם attristé
מ ב racine de « le meilleur, le choisi »
( כ ר ו (ב : le plus jeune ( le chérubin)
צ א ן
effectivement « menu bétail » ; brebis
ה ב י que l’on peut transposer en ב ה י livrer
( מ ח ל (ה pardonner / faiblesse – maladie
ב ה ו le vide, nu, par extension dénuement
א ל ו Un des noms de D.
מ נ ת part- portion.
Après cette liste décomposée sans doute un peu fastidieuse pour certains, j’ai essayé de « reconstruire » le sens ou de trouver une histoire derrière l’Histoire , afin d’en tirer un lien éventuel avec ce que nous connaissons dans notre vie ou dans notre monde.
Caïn, après la récolte qui certes lui a demandé beaucoup d’efforts ( la traduction officielle : « au bout d’un certain temps » en témoigne) offre des fruits de son champ cultivé au Seigneur, dans un don qui relève plus d’un rituel d’offrande, de sacrifice, de « tribut » aussi. Caïn est le plus riche des deux frères ; peut-être le plus vigoureux, le plus travailleur… ?
Abel, lui, semble être le plus pauvre (dans « pasteur » en hébreu :
צ א נ ו
il y a aussi ע נ י par permutation l’adjectif « pauvre »
Abel, attristé de ne pouvoir offrir davantage à son Seigneur et demandant pardon du dénuement de son offrande, désireux de donner le meilleur de son menu troupeau choisit le plus jeune de ses agneaux pour le déposer (comme un trésor) sur la table de D.
(Il y a aussi le mot מ ח ל ה transposé מ ה ל א qui évoque la faiblesse, la maladie : le reste du troupeau était-il malade ? Ou bien Abel était-il plus fragile que son frère ?…)
Dès lors, l’on pourrait comprendre, chose qui est surprenante sans autre interprétation, que D. ait préféré le signe du sacrifice de l’humble et du pauvre par rapport au rituel du riche.
Les paroles du Seigneur à Caïn doivent être prises sur le plan d’un éveil personnel et un encouragement à comprendre la portée de ce choix :
« Si tu t’améliores (non sur le plan de la valeur du travail, ou de la pensée de rendre grâce, même si cela est important) tu pourras te relever… » en fait au sens d’« élever », « élever son âme » en fuyant le « Péché » ( d’orgueil ? De jalousie ? D’indifférence aux gestes simples, mais qui ont plus de valeur que les grandes cérémonies).
Quel rapport avec « nous » ? ( א נ ו dans le texte)
Celui qui a le plus de richesses jalouse encore celui qui en a le moins ou qu’il craint ; il ne reconnaît pas toujours l’effort que fournit l’autre pour dépasser sa faiblesse ou sa pauvreté et conserver cependant l’espoir d’une dignité et d’une re-« connaissance » ( dans certaines traductions Caïn répond au Seigneur : « je ne le connais pas ».
L’amélioration demandée n’est pas dans la « production » ou la rentabilité matérielle, mais dans la profondeur symbolique des gestes en direction de l’Autre, comme en direction de D.
Abel se croit faible, peut-être l’est-il vraiment, mais il est le plus fort dans le sacrifice de ce qu’il a de plus cher, rare et fragile.
Notre sentiment d’infériorité ne doit pas se muer en haine de la force intérieure (ou extérieure) d’autrui.
D. conseille à Caïn de s’élever comme D. élève le frère ( א ח י ) juste et le simple ו ת ם
qui brille dans son champ ( ב ה י (ר
si Caïn ne s’élève pas en dignité il risque d’être offert lui- même
et pour son malheur ו א ם comme le « bouc » ת י ט permuté en
ת י ש du « rituel » : ה ל ו א et voué au « souffle du néant » : ה ב ל
Lecture parallèle qui n’engage que mes recherches de sens au-delà du premier sens… Et dont la traduction illustre les « interprétations hasardeuses » que l’on peut faire quand on n’est pas de la Tradition, et qui plus est lorsque l’on est une femme, mais en quête de sens au sein du non-sens.
Comme suite à l’étude précédente, un essai de développement de lecture des Lettres et groupes de Lettres sur le verset 8 de Gén.4 – Traduction de l’édition bilingue La Bible du grand-Rabbin Zadoc Kahn : éditions Colbo :
« Caïn parla à son frère Abel ; mais il advint, comme ils étaient aux champs, que Caïn se jeta sur Abel, son frère, et le tua. »
א מ ד estimer ( estimation)
א ל pouvoir- force- héros -D.
Après les verbes de mouvement : direction du corps vers… ou de l’esprit ; « contre » aussi.
Après les verbes qui n’indiquent pas de mouvements : « au sujet de ».
א ח י ו le frère
י ה י fier, présomptueux, orgueilleux
( ב ה י ( ר clair-brillant
ב ה י ל ו hâte, promptitude
ת ם intégrité, parfait, dans son innocence
נ ש ד annoncer, porter un message, une bonne nouvelle
ש ד ה champ
י ק ש ( avec permutation du ם en ש) dresser un piège, tendre un piège
ה ר mont , montagne
ה ר ג tuer- assassiner.
Une version qui peut être discutée :
« Caïn mesura (estima) la force ou le pouvoir d’Abel, le clair, le lumineux.
Alors l’orgueilleux dit à D. avec ( ou feignant l’) innocence ( qu’il allait porter) une bonne nouvelle à son frère en toute hâte.
Mais Caîn tendit un piège à son frère Abel dans la montagne ( ou le lieu où Abel faisait paître ses troupeaux) , et là il le tua. »
Vu sous cet angle, Caïn serait coupable d’un crime avec préméditation…
Mais on préfère plutôt retenir un geste de colère irraisonné durant une bagarre que les deux frères auraient eu dans les champs. (L’histoire ne dit pas s’ils s’étaient entendus pour travailler ensemble montrant ainsi une « nouvelle alliance » entre les frères, et la volonté de Caïn de « s’améliorer ».)
Dans les deux cas, l’amour – propre, la jalousie, l’esprit de revanche, et le manque de respect à l’égard des conseils du Père favorisent la haine de l’aîné à l’égard du cadet et l’aveuglement dans la folie de son acte.
Mais sa conscience est appelée à se réveiller et la honte qui l’habitera dans l’exil qu’il connaît et la solitude face à sa propre mémoire le poursuivront.
L’image de la Terre souillée du sang d’un frère et qui a perdu en quelque sorte son caractère sacré est à méditer aussi…
Avec donc toute l’humilité de l’apprenti-cabaliste Guiz-el et ses excuses pour les erreurs que vous aurez pu déceler !
Caïn et Abel, Guizel.
Très intéressant, mais je ne comprends pas plus haut le « ..qui plus est lorsque l’on est une femme » ! Une petite femme n’est pas capable de réfléchir ou de comprendre ?